RENDEZ VOUS AVEC FRÉDÉRIC CHOPIN
COMPOSITEUR 1810 – 1849

 

Présentation des personnages réels :

Frédéric CHOPIN : compositeur et pianiste virtuose né le 1° mars 1810 à Zelazowa Wola (Pologne) – Décès : 17 octobre 1849 à Paris.

George SAND : écrivain (1804 – 1876)

Personnages fictifs : Héloïse, (la mamie)
Ses petits enfants : Rosalie, Julie, Jocelyn, Florian, Charles, Jean

CHÂTEAU DE NOHANT situé au coeur du BERRY à 30 km de CHATEAUROUX.

***

Héloïse (mamie) – Bonjour les enfants, quel plaisir d’avoir votre visite mais en quel honneur ?

Les enfants : Mamie, tu perds la mémoire, tu ne te rappelles pas ? Tu as aujourd’hui 65 ans et nous sommes le 11 avril 1855, lui répond Julie.

Tous ensemble : – Bon anniversaire Mamie,

Héloïse : Quel beau bouquet !!!!

Florian : – Oui, nous l’avons acheté chez le fleuriste qui habite au coin de ta rue, il y avait beaucoup de jonquilles et nous savons que c’est ta fleur préférée.

Héloïse : Merci, mes enfants, alors je fais la bise à chacun de vous et encore merci, Je vais vous préparer des crêpes et du chocolat chaud.

Jean (le benjamin) : Oh, miam, miam, on va se régaler.

Rosalie : Dis mamie, l’autre jour tu nous as dit avoir travaillé chez le grand compositeur Frédéric CHOPIN et tu as même vécu dans le château de NOHANT où il a vécu quelques années avec George SAND, le grand écrivain.

C’est vrai, mes enfants, mais Frédéric CHOPIN est décédé en 1849, à l’âge de 39 ans.

Julie : Raconte nous, on aime bien que tu nous parles de ta vie pendant ces années là.

Héloïse : L’histoire commence ainsi, j’habitais un château assez modeste près du Château de NOHANT où George SAND et Frédéric CHOPIN passaient tous les étés de 1839 à 1846.

Florian : Mais pourquoi tu es allée travailler chez CHOPIN et George SAND

Héloïse : Eh bien, voilà : ma mère est morte en couche et j’ai été élevée par une nounou gentille pendant mes premières années, mon père s’est remarié avec une très jeune femme prétentieuse, avare, elle a eu deux enfants. Cette arriviste devint comtesse en épousant mon père. Elle me détestait, je n’avais pas le droit de déjeuner à table en leur présence, je mangeais avec la servante à la cuisine. J’étais toujours de corvée de repassage et de raccommodage.

A l’âge de 12 ans, ma belle mère me dit, tu dois aller travailler, tu n’as plus rien à faire ici. D’ailleurs, je t’ai trouvé une place, Frédéric CHOPIN et George SAND ont licencié une domestique et tu vas la remplacer. De toute façon, tu ne peux rien faire d’autre. J’étais furieuse mais contente d’en finir avec cette marâtre *.

Me voilà donc partie au Château de NOHANT avec comme seul bagage, deux robes, des tabliers et une paire de chaussures. J’étais contente de fuir, de toute façon, mon père était sous la domination de cette mégère, jolie, certes, mais manipulatrice.

Le château de NOHANT était très beau, entouré d’une roseraie, l’intérieur était cossu. Madame George SAND était très conviviale, petite et féminine contrairement à ce que l’on disait d’elle, malgré ses gouts masculins puisqu’elle portait souvent pantalon et chapeau d’homme. Elle fumait le cigare, surtout quand elle écrivait une grande partie de la nuit. Mais elle portait aussi de jolies robes de bon goût et son élégance séduisait.

Frédéric CHOPIN n’était pas très grand, il paraissait fragile mais toujours élégamment habillé.

Je fus très bien accueillie, George SAND me confia la couture et comme elle était petite, elle trouvait toujours ses robes trop longues et encombrantes, il y avait toujours une retouche à faire. Elle m’envoyait de temps en temps aider la cuisinière et me laissait préparer son chocolat qu’elle aimait déguster tranquillement après avoir écrit des pages de romans, tels que « LA PETITE FADETTE », « LA MARE AU DIABLE » etc.…
Elle écrivait une grande partie de la nuit en fumant le cigare. Son boudoir empestait le matin et je devais ouvrir les fenêtres car Frédéric CHOPIN n’appréciait guère cette odeur et cela le faisait tousser.

Frédéric CHOPIN travaillait beaucoup, jusqu’à l’épuisement lorsqu’ il préparait un concert.

Le piano était dans sa chambre et des partitions étaient posées un peu partout.
Il me demandait d’y remettre de l’ordre et je faisais de mon mieux.

Un jour, il me dit :

F. CHOPIN : – Mais HELOISE, vous savez lire et écrire.

Héloïse : – Oui, monsieur,

F. CHOPIN : – Vous connaissez le solfège

Héloïse : Non, monsieur

F.CHOPIN : Ah, mais j’ai remarqué que vous chantiez bien, il vous arrive souvent de fredonner mes compositions.

Héloïse : – Oh, pardonnez moi, cela vous dérange peut être

F. CHOPIN : Pas du tout, j’allais justement vous proposer de vous initier au solfège et vous apprendre quelques gammes.

Héloïse : Je ne sais pas si j’y arriverai, ma belle mère me disait tout le temps que la musique et les arts, ce n’était pas pour moi…

F.CHOPIN : Tu es intelligente, tu comprends vite, tu as des mains de pianiste et tu seras capable de jouer un jour. Alors au travail.

C’est ainsi que Frédéric m’apprit petit à petit le solfège et à jouer du piano, disons à pianoter, devant un tel génie on ne peut être que très modeste

George SAND complétait ma culture en me prêtant des livres. Elle me fit même assister à ses soirées littéraires, j’écoutais mais ne disais mot.

Les années à NOHANT se terminèrent car j’ai épousé votre grand père, naquirent mes deux enfants.
Fatigué par son travail, plutôt épuisé, votre grand père mourut jeune d’une phtisie galopante **.

Mais l’histoire n’est pas finie. Frédéric CHOPIN avait gardé un contact avec moi, bien qu’il fût séparé de George SAND.

Nous avions l’un pour l’autre une amitié sincère. Nous avons donc entretenu une correspondance épistolaire. Il me parlait de ses compositions, de son angoisse avant un concert. Il était toujours tourmenté et inquiet.

Il était très demandé pour des concerts dans les salons de l’aristocratie parisienne mais cela le fatiguait énormément.

Le 16 septembre 1847, il m’écrit qu’il ne veut plus composer, qu’il est très fatigué.

Le 16 février 1848 : Il m’envoie un courrier m’indiquant son dernier concert à Paris, puis,

Il me demande de me rendre à Paris pour le rencontrer.
Je me rends à son chevet, je retrouve un Frédéric extrêmement faible avec des difficultés respiratoires. Il me reconnaît tout de suite.

F.CHOPIN : Toujours la même HELOISE

Héloïse : Mais vous aussi, Monsieur, vous ne changez pas

F.CHOPIN : Hélas, Héloïse, je sens que je vais mourir.

Héloïse : Mais non, vous, vous ne mourez jamais, vous laissez une grande oeuvre et on ne vous oubliera jamais.

F . CHOPIN : Comme tu es gentille, tu te rappelles de « LA VALSE De l’ADIEU »,

Héloïse : Oh oui, magnifique.
Et puis, un long silence s’installa………………………………………………………………………………….
Je me retirai pour laisser place à sa famille et à ses amis qui venaient d’arriver, entre autres, la comtesse POTOCKA, GUTMANN, son ami fidèle, le violoncelliste Franchomme, la princesse CZATORYSKA et l’abbé JELOWICKI.

Le 17 octobre 1849 à 2 heures du matin, Frédéric s’est éteint.

Rosalie : Alors, mamie, tu as pleuré

Héloïse : Bien sûr, il était si attachant, il s’emportait parfois car il n’était jamais satisfait, très perfectionniste et vous auriez vu ses mains, elle volait sur le clavier, de grandes mains fines et superbes. Regardez, j’avais dessiné ses mains.

Elles sont magnifiques s’exclament les enfants.

Héloïse : Bon, les enfants, nous allons jouer dans le jardin, faisons une ronde.

Soudain, Rosalie m’arrête,

– Attends mamie, j’ai une question à te poser.

Héloïse : Oui, je t’écoute.

Rosalie : Mamie, si tu meurs un jour, tu vas aller où ?

Je ne sais pas car personne ne le sait, « au ciel » comme on dit. Il n’y a peut être rien mais tu sais, s’il y a quelque chose, j’aimerais revoir Frédéric CHOPIN la haut, tout la haut, tu vois, dans un nuage, il continuerait à m’apprendre le piano, je jouerais la VALSE DE L’ADIEU, et je lui demanderais de me jouer ses magnifiques concertos N° 1 et n° 2 pour piano.

– OH ouais, c’est beau cette musique, répond ROSALIE.

Héloïse : Regardez les enfants tous ces petits oiseaux qui se réunissent sur les branches des arbres et comme ils gazouillent.

JEAN (le benjamin) : Ils chantent pour CHOPIN, mamie.

HELOISE : Sans doute et pourquoi pas ?

Les enfants partis, Héloïse, comme d’habitude, s’endormit dans son fauteuil et fit ce rêve étrange :

Elle se trouvait plongée en l’année 3849 au printemps.

Le CHATEAU DE NOHANT dans le Berry, la grande demeure avait disparu. Elle était remplacée par un Dôme immense ressemblant à une boule de cristal. Des parterres de fleurs multicolores entouraient cette demeure. La roseraie était toujours là.

Une musique légère, douce, s’échappait du Dôme. A l’intérieur, un jeune homme très élégant jouait du piano sur un immense piano blanc.
Légèrement appuyée sur le piano, une jeune femme écoutait attentivement.

La jeune femme : Je n’ai jamais entendu cette valse, que joues-tu ?

Le jeune homme : je l’ai composée ces dernières années, elle s’appelle

« LA VALSE DE L’ETERNITE », elle ne s’arrêtera jamais……………………………………………………………..
Valse légère, éternelle, qui vous emporte dans un rêve….Dans un dernier pianissimo, la valse se termine.

Le jeune homme se lève, la jeune fille applaudit. Ils se dirigent tous les deux vers la roseraie et disparaissent dans un rayon de soleil couchant.

Héloïse se réveille, regarde autour d’elle, la pièce est toujours la même. Elle a rêvé, dommage, et si c’était vrai !!!.
Comme d’habitude, seule, dans la cuisine, elle s’attable pour manger un frugal repas.

 
 

* marâtre : mauvaise mère ou belle mère d’enfants d’un premier mariage.
**phtisie galopante : tuberculose pulmonaire évoluant rapidement (expression très utilisée au 19° siècle)